Du mauvais usage de l'inférence bayésienne dans l'apologétique chrétienne contemporaine

Publié le par Miky

Bonjour à tous,

Je n'ai pas le temps et la motivation (du moins pour le moment), d'écrire moi-même un article critique sur ce courant de l'apologétique (notamment chrétienne) qui, avec en particulier des auteurs comme Richard Swinburne, tente de démontrer le caractère hautement probable du théisme, en se basant sur le théorème de Bayes. Cette stratégie consiste, non pas à produire de nouveaux arguments en faveur de l'existence de Dieu, mais à montrer que ces arguments, même si, pris isolément, ne sont pas décisifs, présentent néanmoins une force cumulative qui fait pencher vers le théisme (ce que l'on appelle parfois une "preuve juridique", puisque c'est par une inférence bayésienne plus ou moins consciente et rigoureuse que l'on détermine la culpabilité ou l'innocence d'un suspect au vu d'un ensemble d'indices). Toutefois, une analyse rationnelle montre l'inadéquation de cette démarche à montrer quoi que ce soit en faveur du théisme. Pour s'en convaincre, je me permet (dans un premier temps ?) de vous renvoyer à la lecture de ces deux intéressants articles (en anglais) qui s'employent à faire la critique de ce genre d'arguments cumulatifs :

- Keith Parsons, Science, Confirmation, and the Theistic Hypothesis, "Chapter 3: Swinburne and the Inductive Cosmological Argument".

http://www.infidels.org/library/modern/keith_parsons/theistic/3.html

- Jordan Howard Sobel, Explanations of the Cosmos, Cumulative Arguments, and Pros and Cons to God as a Necessary Being.

http://www.scar.utoronto.ca/~sobel/OnL_T/OnTaliaferro.pdf

Le principal reproche que je ferais à l'inférence bayésienne c'est qu'elle nécessite de poser une probabilité a priori à l'hypothèse que l'on étudie (donc, ici : l'existence de Dieu), ce qui est difficile et grandement subjectif (surtout pour une hypothèse comme celle de l'existence de Dieu !). Mais cela permet de comprendre une réalité psychologique que Matthieu, dans un de ses commentaires sur son blog, ne dément pas, en disant :

"Ces preuves sont cependant insuffisantes à convertir quiconque, puisque Dieu est amour, et non un concept métaphysique vague et abstrait : il ne peut donc se rencontrer que dans une expérience spirituelle qui n'est pas nécessairement sensible, mais qui va toucher le coeur dans ses profondeurs les plus intimes, au point que celui-ci va reconnaître infailliblement la présence de son Dieu."

Ce qu'en termes "mikaëliens" je traduirais plutôt par : ces "preuves" ne sont à même de convaincre que ceux qui y croient déjà :-)

Cordialement,

Miky

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M
Ca dépend. Avant que tu examines ces "preuves", à quelle probabilité a priori estimais-tu l'existence de Dieu ?<br /> De plus, il y a d'autres facteurs psychologiques à considérer qui peuvent influencer nos inférences bayésiennes conscientes ou inconscientes. Je pense en particulier aux biais dans la sélection des données, à la validation subjective, etc. 
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M
<br /> Les preuves dont je parle peuvent convaincre une personne de l'existence de Dieu : ce qui est mon cas. Ces preuves m'ont toujours paru probantes et satisfaisantes sur le plan intellectuel et raisonnable. C'était vrai avant ma conversion, ça l'est a fortiori davantage depuis ma conversion. Je n'ai donc jamais vraiment douté de l'existence de Dieu.<br /> Pour autant, j'ai eu la grâce de rencontrer le Seigneur dans une expérience spirituelle ineffable que j'ai eu l'occasion de raconter sur mon Blog (http://totus-tuus.over-blog.com/article-1501252.html), qui m'a fait passer de la simple croyance intellectuelle en l'existence de Dieu à la foi, qui est une relation d'amour qu'on entretien avec une personne, et non simplement une option philosophique que l'on prend en faveur de l'existence de Dieu.<br /> Que les preuves de l'existence de Dieu maintenant soient impuissantes en elles-mêmes a susciter la foi nous révèle quelque chose d'intéressant, je crois : c'est que l'Amour est quelque chose de bien plus grand que la Raison...<br />
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